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Judith Jouglineu, ancienne comptable et sapeur-pompier volontaire, devenue thanatopractrice  

Judith Jouglineu, ancienne comptable et sapeur-pompier volontaire, devenue thanatopractrice  

Cette Marie-Galantaise de 52 ans, ancienne comptable à Grand-Bourg, a choisi de devenir thanatopractrice. Elle exerce aujourd’hui ce métier-passion dans l’hexagone et souhaite rentrer dans son île. Sans succès pour l’instant alors qu’aucun thanatopracteur habilité par la Préfecture n’exerce à Marie-Galante. À l’approche des fêtes de la Toussaint et de la Commémoration des Défunts, partons à la rencontre d’une professionnelle qui a choisi de nous parler de son activité dans le secteur du funéraire. Elle fait partie de ceux qui préparent nos défunts. Cela peut aller jusqu’à la reconstruction du visage. Une formation difficile et précise.

 

Bonjour Mme Jouglineu, votre parcours  est plutôt original. C’est un sacré grand écart entre la comptabilité et le funéraire.

Bonjour Foufougong, oui en effet. Je suis thanatopractrice depuis 10 ans, diplômée d’état et détentrice d’une habilitation préfectorale me permettant d’exercer sur le territoire national. C’est un métier que j’ai découvert complètement par hasard en discutant avec un ami proche à un moment où je voulais changer de voie professionnelle. J’ai été comptable pendant 20 ans sur l’île ( à la Socofa) et en parallèle  sapeur-pompier volontaire à la caserne des pompiers de Marie-Galante.

Ce n’est pas venu de suite mais quand on souhaite changer de voie il faut faire un bilan de compétences avec le Fongecif et ce qui en est ressorti c’est que j’aimais beaucoup l’humain, aider les autres. Par ailleurs, j’ai toujours été intriguée par la mort, je posais beaucoup de questions quand je voyais les défunts. Je me suis documentée longuement sur ce métier et j’ai été accompagnée par le Fongecif de Guadeloupe afin de me préparer sereinement à ma reconversion professionnelle et surtout vis-à-vis de mon employeur afin de présenter un CIF (congé Individuel de formation) qui a été accepté puis je me suis envolée vers l’hexagone. La première difficulté c’était de tout laisser sur l’île (avec mon fils mineur à l’époque) que je n’avais jamais quitté à part pour mes études en Guadeloupe.

Il y a beaucoup d’inscrits et environ  500 candidats mais seulement les 60 meilleurs sont pris.

J’ai été acceptée à la faculté de médecine de Lyon mais après réflexion j’ai opté pour une école privée de thanatopraxie à Marseille. Le cursus est de deux ans couronné par un concours national difficile du Ministère de la Santé. Il y a beaucoup d’inscrits et environ  500 candidats mais seulement les 60 meilleurs sont pris. La première année, c’est la théorie avec deux matières principales : médecine et thanatopraxie mais j’ai étudié aussi l’anatomie, la toxicologie, la microbiologie l’histologie et la médecine légale. Si on réussit la première année, on poursuit la deuxième  avec obligation de pratiquer sur 100 défunts avec un thanatopracteur  qui aboutit  à un  passage devant un jury national. Le thanatopracteur peut exercer seulement quand le Journal Officiel du ministère de la Santé est publié. Quelle fierté de voir son nom y figurer. Les études de thanatopraxie sont onéreuses environ 13 000€. Mon cursus est complet au niveau des diplômes funéraires (Conseiller funéraire, Maître de cérémonie, thanatopracteur, Dirigeant d’entreprise funéraire) et je suis à la tête de mon entreprise dans l’hexagone.

En quoi consiste votre métier ?

“Après mon passage, le défunt a un visage apaisé et serein, non altéré par la souffrance ou les stigmates de la maladie”

Cela consiste à intervenir sur le corps des défunts à la demande de la famille. Je réalise des soins de conservation. Cela a plusieurs finalités comme stopper l’évolution des bactéries conduisant à la décomposition du corps mais aussi à évacuer les liquides physiologiques. Le défunt doit être présentable. Tout doit se faire avec précision pour redonner au défunt une apparence reconnaissable. Je travaille à partir des photos que la famille me confie afin que le résultat soit esthétique. En tant que professionnelle, mon devoir n’est pas seulement de conserver mais aussi de restaurer. Après mon passage, le défunt a un visage apaisé et serein, non altéré par la souffrance ou les stigmates de la maladie.

Je réalise d’autres procédés à part le soin de Conservation comme la toilette funéraire, le retrait de Pacemaker, les soins spéciaux comme le soin sur les corps autopsiés, le soin de rapatriement et soin sur corps prélevés (prélèvement d’organes). Je pratique aussi la restauration : Une technique moins invasive et qui va corriger les imperfections ou les dommages sur le visage (tumeur, déformation ou décomposition).  Il y a également la reconstruction faciale, une technique longue et complexe qui implique la reconstruction des parties osseuses du visage ou du crâne ( accidents de voiture, blessures par balles). Toutes ces techniques sont des actes invasifs donc j’utilise des instruments chirurgicaux. J’exerce seule : à domicile, dans les funérariums, les hôpitaux et  les EHPADs.

C’est un métier particulier. On est en contact avec la mort. Comment on sait que le travail est bien fait ?

“Ma satisfaction (…), c’est que même quand le corps est dégradé et que les pompes funèbres  annoncent à la famille que le défunt n’est pas présentable, qu’après mon intervention j’annonce que le défunt peut être présenté”.

Ma satisfaction c’est lors de la présentation du défunt, que la famille me félicite en disant qu’on pourrait croire qu’il dort, que c’est comme si le défunt n’était pas mort, qu’il est beau et souvent un « merci ». Surtout quand le corps est dégradé et que les pompes funèbres  annoncent à la famille que le défunt n’est pas présentable et qu’après mon intervention j’annonce que le défunt peut être présenté. Voir la joie et le soulagement des familles. C’est cela ma satisfaction d’un travail bien fait. ‌Après mon intervention, le corps peut reposer dans son lit ou au funérarium plusieurs jours sans crainte. ‌Mon métier exige une grande humilité, je travaille dans l’ombre. ‌Il faut être capable de se détacher de ses émotions. Il est important de se préparer aux chocs éventuels, une bonne condition physique avec une stabilité émotionnelle. ‌C’est un métier très éprouvant psychologiquement et physiquement. Je prépare environ 60 à 80 corps par mois. Mon rêve serait de rentrer et d’exercer chez moi. J’ai déjà eu à préparer un artiste antillais, un évêque, un homme politique, et  beaucoup de compatriotes antillais et mon rêve serait de rentrer à Marie-Galante pour le faire à domicile mais malheureusement pour l’instant, les tentatives ont été vaines.

 

 

 

 

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