En moins d’un an, il avait réussi à se faire un nom. Ouvert en plein Covid, en avril 2021, le beach bar saint-louisien fonctionne depuis du feu de dieu. Enfin, quand il est ouvert car en pleine pandémie, ce n’est que depuis novembre dernier, qu’il est ouvert non-stop. Dans un premier temps spécialisé dans les sushis et makis, il était revenu à des plats, des pizzas et des bowls, après le départ du « sushi-man » (le chef sushi). Peu importe, le Namasté* (expression bouddhiste utilisée pour saluer, dire merci et au revoir) enchaîne les petits-déjeuners à partir de 7H et les soirées. Un succès. Pourtant, tout sera démonté d’ici quelques jours. Ce qui avait réussi à devenir un aimant à locaux et touristes, faisant partie des spots qui drainent de l’affluence pour le centre-ville de Saint-Louis, ne sera bientôt plus. La soirée cubaine du 26 février prochain sera la dernière du lieu. Ciao les decks, les tables, les parasols, la face de Bouddha en grand format sur un morceau de façade à partir du 28 février.
« Je vais le laisser dans l’état où je l’ai trouvé. J’ai une équipe de trois personnes qui débarque. On démonte tout ce qui est électrique, tout ce qui est bois. Tout sera étiqueté, rangé et ça va resservir, ça va ressortir un jour. Je garde tout, les grandes jarres, on va les réutiliser à Grand-Bourg », annonce Franck Perez, alias Gino, le gérant du Namasté et de Chez Gino, à Grand-Bourg.
La grande question : pourquoi ? Réponse simple : Le bail n’est pas renouvelé.
«Quand on a entendu parler des travaux sur le port de Grand-Bourg qui allaient entraîner la fermeture de Chez Gino pendant plusieurs mois, ici, c’était une solution de repli. Je n’ai pas tout de suite vu le potentiel. On est venus visiter ici après une tempête alors c’était tout en friches. Et également, on a un problème de staff : trouver cuisiniers, serveuses, le petit-déjeuner à 7h du matin, c’est très compliqué », explique Gino. Tout ça c’est le contexte, mais il y a surtout eu…
Du rififi sur le sable…
Tous ces derniers mois, il y a eu des problèmes de voisinage. L’accès au beach bar a même dû être modifié afin de contourner la zone de mésentente entre deux parcelles. Des barrières métalliques étaient régulièrement visibles sur le sable. Un vrai feuilleton à rebondissements. Il faut dire que quand Gino arrive, il ne s’installe pas à moitié. Il fait 30 000 euros de travaux en construisant un deck qui…empiète sur la partie allouée à la petite maison juste à côté. « Moi, la personne qui m’a sous-loué l’endroit m’avait dit en m’installant que la propriétaire de la petite maison n’était plus là, qu’elle serait ok alors quand on me dit « tu fais ce que tu veux, eh bien moi je fais des plans et le projet est sorti en quelques jours»…, se remémore Gino tout en reconnaissant maintenant qu’il aurait dû vérifier. Sauf que la voisine se manifeste. Pas si ok que ça apparemment avec le fait qu’une partie du deck du restaurant morde et même mange sa partie de littoral et que l’entrée des clients de Namasté se fasse sur un bout de son terrain, sans avoir été prévenue. L’ambiance se dégrade vite entre les deux parties.
« C’est dommage qu’on n’ait pas pu s’entendre avec la voisine parce qu’on aurait pu faire quelque chose de bien mais bon… », regrette-t-il tout en reconnaissant : « J’ai un caractère à la con aussi. Je monte vite mais je redescends aussi vite ». Gino est du genre à mettre un drapeau britannique au-dessus de son restaurant en pleine période de querelle franco-britannique sur les zones de pêche. C’est vous dire l’esprit provoc’. Il n’y a qu’à suivre ses posts Facebook sur son profil pour cerner son sens de la dérision osée qui peut ne pas plaire à tous y compris au réseau social de Zuckerberg qui l’interdit régulièrement de publications.
- Mieux le connaître avec ce podcast disponible « Mais c’est qui Gino ? »
« S’il n’y avait pas eu tout ça, on serait restés », indique-t-il. Du côté du voisin immédiat côté quai, Abraham Zélateur, du Jaz Karayib, on ne saute pas non plus de joie. Contacté par téléphone ce mardi 22 février, il fait cette déclaration : « Je vais te parler franchement. Au début, j’étais embêté par son arrivée (de Gino, ndlr) mais finalement, ça a fait du bien et ça a ramené du monde sur Saint-Louis. On essayait même de s’organiser pour ne pas faire d’événements en même temps ». Une chose est sûre, cette parcelle ne restera pas inexploitée bien longtemps. Foufougong n’a pas réussi pour l’heure à joindre l’occupante de la parcelle voisine qui aurait indiqué avoir « un projet de restaurant ». À suivre…
Le Namasté 2 arrive bientôt…mais où ?
Pour l’instant, retour à Grand-Bourg pour les équipes après la fin des travaux de voirie du port. «On a pu tester des choses au Namasté et on va les appliquer chez Gino. On va essayer de séduire la clientèle du midi. Il y aura une nouvelle carte avec les salades végétariennes, les asian bowls. On rajoute des pâtes fraîches, des huîtres à la carte, du vin grand cru. On monte le niveau car j’ai l’impression que les restaurants stagnent sur leurs acquis ». Toutefois, Gino confie qu’il n’abandonne pas l’idée d’ouvrir un Namasté 2 sans toutefois donner plus d’indications sur le nouveau lieu. « Ce ne sera pas au Tiki (le beach bar situé à l’entrée de la ville non loin du Skipper), contrairement à ce que certains ont pu dire. Je n’ai pas les moyens pour racheter le Tiki ».
Bien conscient du potentiel du littoral saint-louisien
Le temps passé au Namasté ces derniers mois a été instructif. « En plusieurs années de présence ici, je n’avais jamais vu autant de nationalités différentes d’anglophones à Marie-Galante. Le potentiel est énorme. Il y a entre 70 à 150 bateaux chaque jour ici (dans la baie de Saint-Louis, ndlr). Quasiment en permanence. Sans parler du bateau de l’Iguana (la compagnie qui fait la rotation St-François/ Les Saintes via Saint-Louis), qui vient de reprendre. Les clients viennent ici en arrivant à 8h15. Les petits déjeuners, c’est grâce à eux que ça cartonne et quand ils repartent, vers 16h15, ils viennent prendre un dernier verre ici. Ils arrivent vers 15h pour ne pas louper leur bateau et consomment. On aurait même souhaité avoir un moyen de communiquer avec les bateaux en face et donner les soirées, les services… Au lieu de faire des restaurants à profusion et tout le monde qui fait pareil, il faudrait faire quelque chose pour capter cette clientèle : un spot wifi, une douche, un glacier, une capitainerie quoi. Les touristes viennent me demander de l’eau. On a toujours besoin d’eau sur un bateau. Il manque une laverie. Il n’y en a pas à Saint-Louis. On ne va pas tous faire un restaurant. Au bout d’un moment, ça n’a pas de sens», conclut-il.