À Marie-Galante, ce sont les ophtalmologues qu’il faudrait accueillir avec des applaudissements à la descente du bateau ou de l’hélico. Pour voir un spécialiste des yeux, il faut se lever tôt et attendre… beaucoup. Il n’y a plus de cabinet de spécialiste sur l’île depuis quelques années, alors ce sont ceux du CHU qui sont envoyés… quand ils en ont la disponibilité.
Quand vous dites que vous allez appeler le Centre Hospitalier Sainte-Marie de Grand-Bourg pour prendre rendez-vous à la consultation, les yeux des interlocuteurs s’écarquillent comme pendant un examen oculaire. Les pupilles se dilatent puis cette phrase résonne : «Ah ben, donne-moi des nouvelles si t’arrives à avoir un rendez-vous», nous dit-on sarcastique. En ce moment et depuis quelque temps (crise sanitaire oblige explique-t-on au standard du service au CHSM), il n’y a qu’une seule visite par mois et à chaque fois le spécialiste voit 18 personnes par jour, pas une de plus. Une jeune femme témoigne : «J’avais une affection à l’œil dont personne ne trouvait l’origine qui revenait périodiquement mais à chaque fois que j’allais au service, ce n’était pas possible d’accéder aux urgences. On me disait qu’on allait me rappeler le mois prochain et on ne me rappelait pas. Je suis finalement allée voir mon médecin traitant qui m’a obtenu un rendez-vous en signifiant l’urgence de la situation », conclut cette jeune femme. De notre côté, Foufougong a eu le standard mais une personne bien désolée nous confie : « En mai, il n’y a pas de place. En juillet non plus et en juin, il n’y a pas de visite ». Mais pas la peine d’espérer puisqu’on nous indique qu’entre les personnes âgées qui ne peuvent pas prendre le bateau, les personnes des Ehpad, bref toutes les personnes prioritaires, les places sont rares voire inexistantes. Au CHU, on explique que « pour cause Covid, on a privilégié les patients atteints de pathologies plus ou moins graves (glaucomes, cataracte, cornée…). Les visites classiques pour correction de verres, lentilles devant se faire chez les spécialistes de ville ». Spécialistes qu’il n’y a pas à Marie-Galante. Alors, les affections plus graves sont traitées en priorité, ce qui se comprend, mais pour les autres c’est le système D…
Les médecins généralistes, très sollicités
Dans un cabinet généraliste de ville, on note l’augmentation de la demande d’ordonnances de lunettes comme motif de visite. Si la pratique est courante au niveau national car les délais de rendez-vous chez ces spécialistes ont toujours été longs, depuis quelques temps, cela s’est généralisé à Marie-Galante. On vient avec une ancienne ordonnance et on fait renouveler. «Mon collègue en a fait une douzaine de ces ordonnances cette semaine, moi deux ou trois mais c’est révélateur », affirme le médecin qui confie ne pas être à l’aise avec cette pratique. « On n’est pas des copieurs-colleurs normalement. Ro machin, je ne sais pas ce que c’est », dit-il en reprenant le contenu de l’ordonnance. « On n’aime pas ne pas comprendre ce qu’on prescrit », avoue-t-il. Et surtout qu’en est-il de la surveillance de l’évolution de la correction du patient ?
De nouveaux arrivants au CHUG, et un ophtalmologue intéressé
Le CHU annonce que depuis récemment trois nouveaux spécialistes sont arrivés. Jusqu’à présent, le CHU de Guadeloupe tournait avec deux ophtalmologues. Ils sont donc maintenant cinq. Des internes sont également arrivés. Trois ont été accueillis ce lundi. Ils sont donc 7.
« Oui mais combien arriveront à Marie-Galante ? », se questionne le médecin de ville qui se rappelle qu’il y avait pourtant une ophtalmologue à Marie-Galante il y a trois ans environ et qu’à l’époque, il y avait au moins six visites des médecins du CHU dans le mois et dès qu’elle a fermé son cabinet puisque ça lui faisait aussi concurrence, les vacations du CHU ont été plus rares ». Le CHU dit se remettre en ordre de marche afin que les permanences externes puissent reprendre à un rythme habituel. De son côté, le CHSM indique avoir eu un contact avec un ophtalmologue bientôt à la retraite, qui viendrait s’installer à titre privé à Marie-Galante et qui a proposé à l’hôpital d’assurer des visites en ophtalmologie. « Rien n’est encore signé pour le moment mais il y a un léger espoir », précise M. Jasmin, interrogé par téléphone. Wait and see…même si c’est un peu flou.