À l’occasion du 8 mars, Foufougong célèbre aussi cette journée internationale des Droits des Femmes. Savez-vous en plus que le lectorat de nos réseaux est en grande partie féminin? On a décidé de rencontrer des anonymes, qui ne font partie d’aucun plan de communication de collectivités, d’entreprises, d’administrations mais relèvent tous les jours des défis inimaginables.
Elles ont la vingtaine, la trentaine, la cinquantaine. Ce sont des femmes de Marie-Galante et elles ont des métiers, des parcours hors du commun, des caractères bien trempés, et surtout des rêves. Elles se confient spontanément, complètement. Ce sont de vraies rencontres et des paroles spontanées. Elles sont productrice de charbon, agro-transformatrices dans le manioc, chargée de mission au Port de Folle-Anse, cheffe d’entreprise dans le BTP. Il en ressort une façon bien à elles de mettre en oeuvre des logiques qui ont du sens, de réinventer leur process, de faire preuve de pragmatisme et surtout le souci de laisser une trace pour tout un chacun et pour tout un pays au-delà de leur personne. En les écoutant, on se rend compte qu’il y a sans aucun doute une façon de travailler, corps et âme, de remplir une mission, propre aux femmes.
Sharon Laurent, 52 ans, exploitante agricole qui produit du charbon
Mère de huit enfants et exploitante agricole, Sharon produit du charbon depuis cinq ans. Ce fut son alternative à la canne devenue de moins en moins rémunératrice. « Si vous ne faites pas vos comptes, vous ne voyez pas ce que je vous dépensez et vous pouvez avoir l’impression que ça vous rapporte alors que vous perdez », livre-t-elle en bonne gestionnaire. Son choix depuis cinq ans : faire du charbon. Et celui-ci rencontre tellement de succès que sa réputation dépasse même les frontières de Marie-Galante. Elle en envoie par la barge en Guadeloupe continentale vers la Basse-Terre et la Grande-terre où elle livre des clients fidèles. Son charbon, elle le fait à partir de raisiniers bord de mer, de quenettiers et même de Saint-Domingue, à partir de bois vert et non de bois sec. « Ce qui m’importe c’est que le client soit satisfait et les clients me disent que mon charbon conserve plus d’énergie alors que d’autres perdent leur énergie plus vite ».
Une véritable Mèt a mannyòk qui charbonne au propre comme au figuré. Quand elle vous reçoit à son domicile de Gagneron, difficile de l’imaginer avec sa tronçonneuse en train de débiter les arbres ou nettoyer un terrain miné d’arbustes à épines, pourtant elle s’est construit en quelques années une solide réputation dans le secteur.
Sharon:
Loriane Coquitte, de cadre RH chez Orange à Paris à cheffe d’entreprise dans le BTP à Marie-Galante
A 35 ans, Loriane Coquitte, fait un retour au péyi intense depuis trois mois. La jeune femme a quitté Paris et son poste de Cadre Ressources Humaines à Orange pour venir reprendre le commerce de carrelage de son père décédé en 2019 qu’elle gérait à distance depuis quelques années. « La charge de travail ici n’est absolument pas moins intense que dans l’hexagone bien au contraire. Les difficultés rencontrées : la lenteur administrative, tout un écosystème qui n’est pas digitalisé, des horaires pas tout le temps respectés. Néanmoins, elle garde son objectif en vue : se diversifier, monter en compétences et sauvegarder l’entreprise que son père a construit sa vie durant.
Natacha et Maëva Darin, 46 et 26 ans, une mère et sa fille, la transmission de la passion du manioc
Farimag est désormais leur kassaverie-maniocrie située à Jacquelot (Capesterre).
Natacha Darin, 46 ans, a commencé Farimag il y a 20 ans, et sa passion, elle la tient déjà des femmes de sa famille. Le manioc, c’est sa vie, sa passion et elle tente de l’emmener le plus haut possible mais suite au Covid, son entreprise de transformation a failli s’arrêter. Plus de clients, plus d’entrée d’argent. Elle se confie à sa fille Maëva qui elle poursuit alors des études en pâtisserie. Pas question pour cette jeune femme que l’entreprise périclite. Elle décide de revenir au pays en interrompant sa formation pour l’aider à relancer leur affaire. De son côté, Natacha Darin est une femme de grande volonté qui a des rêves pour le manioc. Sa fille est animée de la même passion presqu’une mission car travailler dans une activité où on ne compte pas ses heures pour vendre un produit apprécié mais dont le travail manuel exigeant n’est pas toujours considéré à sa juste valeur est parfois ingrat. Leur objectif : parvenir à une semi-industrialisation et ouvrir leurs horizons au-delà de la Guadeloupe.
Ecoutez tout d’abord Natacha Darin, interviewée par sa fille Maëva, pour Foufougong
« En tant que femme entrepreneuse, si on réussit à Marie-Galante, on peut aller en Afghanistan »
Quant à Maëva, à 26 ans, elle n’a pas moins de caractère. Elle aussi tracera sa voix dans le monde de l’entreprise. Elle encourage elle aussi toutes les jeunes femmes à oser se lancer
Fabienne Bonbonne, 53 ans, chargée de mission au port de Folle-Anse (Grand Port Maritime) « Il faut se faire respecter sinon c’est n’importe quoi »
Quand on la croise, elle a souvent son talkie-walkie et on doit avoir son feu vert pour pouvoir accoster ou faire d’autres manœuvres nécessaires au bon fonctionnement du Port en eaux profondes de Folle-Anse. C’est ici que sont débarquées toutes les marchandises qui intègrent ensuite les réseaux de distribution de Marie-Galante. Alors qu’elle vient de communiquer avec l’Orca, une barge qui laisse débarquer un camion Brinks, Fabienne Bonbonne doit aussi observer comment sont récupérées certaines marchandises dangereuses. Elle fait preuve de poigne car c’est nécessaire sur cette zone où s’entrecroisent tant de biens aux descriptions variées : biens de consommation divers à côté de bouteilles de gaz. Elle est seule sur cette interface qui relie Marie-Galante au monde à assurer la mission de capitainerie, d’exploitation, de gestion du port de Folle-Anse, l’entretien et la mission de sûreté portuaire. Elle voit partir le sucre, le rhum et son métier la garde en contact direct avec la réalité du pays. Son caractère bien trempé lui est bien utile pour faire fonctionner l’interface marchandises de l’île. On l’écoute dans l’ambiance du port de Folle-Anse, une mini-fourmilière
Allez, à l’année prochaine pour d’autres portraits de femmes à Marie-Galante qui nous permettent de mieux nous connaître.